Propagande de guerre
Grâce à la chance que nous avons de vivre dans un monde démocratique et, Ô combien, intellectuellement développé, nous sommes aujourd’hui capable de pouvoir nous faire une opinion mûre et réfléchie sur les conflits mondiaux. Que les guerres soient froides ou chaudes, au nord, au sud, à l’est ou à l’ouest, les docteurs en érudition géo-politiques et stratégie nous éclairent de leur savoir incommensurable.
La presse libre, les journalistes vertueux ainsi que la reproduction respectueuse et scrupuleuse de la parole de l’ensemble des acteurs des conflits actuels permet à chaque lecteur et auditeur d’obtenir la vérité lumineusement exacte en quelques clics opportuns. Grâce à ceux-ci, les experts spécialistes de tous bords et sans aucune censure ont pu exprimer leurs idées et opinions. Il est extrêmement important de noter que les grands acteurs mainstream se font un point d’honneur à partager l’ensemble des idées divergentes et sélectionnent des faits dans une recherche d’équilibre, d’exactitude et d’impartialité sans jamais se permettre de donner une information incomplète ou biaisée. Du moins, pas dans notre partie du monde occidental, évidemment.
Alors, vous aussi, pouvez-vous facilement et aisément différencier les bons des mauvais? Savez-vous distinguer la liberté démocratique d’un autoritarisme de bas étage? Êtes-vous à même de reconnaître un horrible dégénéré sanguinaire à la moindre de ses apparitions? Mieux, peut-être êtes-vous un puits de science du conflit israëlo-palestinien, les autorités ukrainiennes sont vos amies et vous êtes prêts à combattre farouchement la terreur assis derrière votre petit écran? Ou alors, vous êtes persuadé que le monde occidental vous mène en bateau, que tous les journalistes présents en Syrie sont des espions et que Meta TV n’engage que des Pulitzer?
Profitons donc des commémorations du centenaire de la guerre 1914-1918 pour (re)découvrir un certain Lord Arthur Ponsonby qui avait édicté 10 lois sur la propagande de guerre en… 1914. Anne Morelli les développe dans son livre Principes élémentaires de propagande de guerre: utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède… 1
- Nous ne voulons pas la guerre.
- Le camp adverse est le seul responsable de la guerre.
- Le chef du camp adverse a le visage du diable (ou « l’affreux de service »).
- C’est une cause noble que nous défendons et non des intérêts particuliers.
- L’ennemi provoque sciemment des atrocités, et si nous commettons des bavures c’est involontairement.
- L’ennemi utilise des armes non autorisées.
- Nous subissons très peu de pertes, les pertes de l’ennemi sont énormes.
- Les artistes et intellectuels soutiennent notre cause.
- Notre cause a un caractère sacré.
- Ceux (et celles) qui mettent en doute la propagande sont des traîtres.
À cela, je me permets de rajouter que Noam Chomsky a démontré le rôle transparent et civique des médias sous la démocratie dans Media Control the spectacular achievements of propaganda 2. Enfin, je me réjouis légitimement du fait que dans notre partie de la planète, et c’est bien heureux, il n’y ait ni propagande, ni désinformation, sinon le concept énoncé par Ponsonby 3
Quand le peuple d’un pays comprend à quel point le peuple d’un autre pays est, comme lui, dupé en temps de guerre, il sera plus disposé à sympathiser avec celui-ci qu’à le considérer comme criminel.
risquerait de nous empêcher d’aller bombarder des peuples de mécréants barbares assoiffés de sang qui méritent la torture à Guantanamo, l’assassinat sans procès, les frappes de drône ou tout simplement un beau champignon atomique sur la gueule. Avouez, cher lecteur, que le monde serait beaucoup moins drôle sans les War on Terror, Opération plomb durci, ou Barroso qui promet que Poutine va annexer l’ensemble du territoire Ukrainien dans les prochaines heures…
Mon petit conseil du jour est de candidement se rappeler que lorsque le même fait est relaté de deux manières différentes, la vérité peut se trouver dans l’une comme dans l’autre, ne pas y être ou pas nécessairement se situer sur la ligne médiane entre les deux. Notre interprétation doit donc être sujette à caution et les techniques de critique historique doivent être utilisées.
En gros, utiliser son cerveau est toujours le bienvenu, même si c’est plus simple de hurler avec les loups.
Un exemple de propagande démontrée par une émission satirique nous vient d’Allemagne: Die Anstalt et son sketche « propaganda » sur le conflit ukrainien et la couverture de celui-ci par les médias allemands. La version avec les sous-titres en français est ci dessous. Par contre, comme cette vidéo ne m’appartient pas, je ne sais pas si elle restera disponible sur la plate-forme de Google. Bon amusement et ne vous laissez jamais abrutir même lorsque c’est plus facile de ne pas réfléchir…
1. Anne MORELLI, Principes élémentaires de propagande de guerre : utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède…, nouvelle édition revue et augmentée, éditions aden, 2010, 191 pages.
2. Noam CHOMSKY, Media Control the spectacular achievements of propaganda, seven stories press, New-York, 1997, 58 pages.
3. Arthur PONSONBY, Falsehood in War-time : containing an assortment of lies circulated throughout the nations during the great war, G. Allen and Unwin, Londres, 1928, p. 28.
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