Contre les attaques, plus de libertés.
Une fois de plus, au lendemain des attaques, nous avons les discours qui pointent les erreurs commises, comme le retour d’Ibrahim El Bakraoui sur le sol Européen. D’autres parlent de menaces, de répliques, etc. Ce qui ressort à mes yeux, c’est le fait que le Peuple est prêt à sacrifier une partie de sa liberté pour plus de sécurité.
En France, depuis les attentats de novembre, l’État d’urgence a été instauré et la Constitution a été changée pour moins de liberté. En Belgique, les militaires étaient dans les rues. Partout, il faudrait plus de portiques de sécurité ou plus de caméras toujours au nom de la sécurité. J’ai l’impression que ces mesures servent à rassurer l’exécutif des États afin qu’ils puissent se présenter devant l’électeur en disant « Nous agissons contre la terreur ! ». Par contre, c’est toujours moins de liberté.
À certains moments, le cynisme l’emporte en pensant que nos chers élus disent à ces mêmes électeurs ce que ceux-ci veulent bien entendre. Pourtant, il me semble plus important d’essayer de trouver des solutions et surtout de comprendre la radicalisation afin de mieux la combattre. En cherchant mes réponses, je suis tombé sur cette vidéo Tribune de l’ULB : après les attentats, comprendre sans excuser : l’apport des sciences humaines et sociales.
Le 8 mars 2016, Michel Wieviorka revenait sur les attentats de Paris lors de la conférence organisée par la Maison des Sciences humaines, notamment sur le phénomène de la radicalisation. Il y énonce deux voies, un contexte socio-économique défavorable ou celle de la « quête de sens ». Je ne reviens pas sur la seconde, c’est essentiellement sur la première que nous pouvons travailler.
En effet, le point commun des radicalisés est le fait d’être passés par la case prison. N’ayant pas trouvé les statistiques belges, je me tourne vers les Françaises : environ 15 % le sont pour trafic de stupéfiants et 25 % pour violences volontaires.1 Or en 2008, Laurent Muchielli estimait que les réformes du droit pénal se font plus à la destination de l’opinion publique tandis que les magistrats et les chercheurs ne sont plus écoutés. 2
Libéralisation des drogues
Actuellement, sur le marché, il y a au moins trois types de drogues dures tout à fait légales : l’alcool, la cigarette et le médicament.
Comme cet article3 le suggère, pourquoi, dans ce cas, ne pas libéraliser toutes les drogues ? Cela voudrait dire que 15 % des détenus ne seraient plus condamnés et, probablement, qu’une partie de ceux qui le sont pour violences volontaires ne le seraient pas non plus.
Je n’y vois que des bénéfices : les dealers auraient un commerce tout à fait légal, paieraient des impôts et l’État pourrait contrôler la qualité des produits. L’introduire en Belgique permettrait également le tourisme de la drogue transfontalier. Pour les plus sécuritaires de mes lecteurs, s’il y en a, cela assurerait des contrôles à nos frontières par… Nos voisins.
Je reviens sur les trois drogues dures présentes dans le commerce légal. Cher lecteur, as-tu remarqué, que leur commerce est assuré par les blancs tandis que presque toutes les illégales le sont par des non blancs ? Alors je suggère de plonger dans cet article de Vice4 A Former Nixon Aide Admitted the « War on drugs » Was Designed to Screw over Blacks and Hippies.
En libéralisant les drogues, toutes les drogues, nous aurons moins de prisonniers, donc moins de détenus tentés par le radicalisme et plus de Liberté. Évidemment, plus de fonctionnaires de police pour enquêter sur d’autres crimes.
Liberté de parler et de débattre
À nouveau, je me joins à Michel Wievorka au niveau de la liberté de donner son opinion. Soyons très clair, l’incitation à la haine et la xénophobie doivent être combattues et la Loi doit servir à donner les outils. Seulement, au lendemain des attentats de Paris, certains adolescents ont été poursuivis pour avoir refusé la minute de silence.
Or, c’est justement, dans le dialogue que la société dans son ensemble peut comprendre la motivation des personnes, jeunes et moins jeunes, qui ne désirent pas se joindre aux commémorations obligatoires. Pour reprendre un des exemples de Wievorka, pourquoi l’anti-sémitisme de Dieudonné est vivement combattu tandis que les insultes aux musulmans ne le sont pas ?
Je vais plus loin que lui, pourquoi un Zemmour a le droit de cracher son islamophobie sur les ondes radiotélévisées en tant que polémiste ? Que serait-il advenu si un autre polémiste avait tenu son discours, mais en parlant des Juifs ? Peut-être qu’en refusant la minute de silence, ces étudiants voulaient simplement dénoncer la liberté de parole à géométrie variable. Or tous les types de xénophobie doivent être combattus avec la même vigueur.
En laissant la liberté de parole et de débattre à tous les acteurs de la société, nous aurons moins de non-dits, donc moins de stigmatisation et de préjugés et plus de Liberté. Dans les limites du respect de l’Autre et de la Loi.
Liberté de (se) connaître
Wievorka parle essentiellement de liberté de recherche, car il parle de la liberté académique. Cependant, à mes yeux, la connaissance et le savoir doivent être libres. L’accès à ceux-ci ne peut être cadenassé. Je ne parle pas seulement des bibliothèques ou de l’internet, je parle surtout du premier chemin vers ceux-ci : la compréhension, la lecture critique.
La liberté de connaître commence par la liberté d’avoir une instruction efficace et qui permette de comprendre le monde autour de soi ou de se former à un métier. Cela ne veut certainement pas dire que tout le monde doit devenir chercheur, mais cela veut dire que tout le monde devrait être libre de choisir une voie dans laquelle il peut approfondir sa connaissance.
De plus, cette connaissance doit pouvoir être partagée et, surtout, être prise en compte. Aujourd’hui, les hommes politiques ne se tournent plus vers les chercheurs, les médias préfèrent les spécialistes et l’éducation nationale n’a pas les moyens de ses ambitions. Seulement, c’est en apprenant à se connaître les uns les autres que les discriminations peuvent être levées.
En donnant la possibilité à tous les citoyens d’apprendre à apprendre, nous aurons moins de laissés pour compte, donc moins d’esprits fermés et plus de Liberté.
Le but des terroristes est de semer la terreur. Répondons leur avec plus de Liberté. Certains lecteurs peuvent penser que je suis utopiste. Je leur réponds que « the War on Terror » ne peut être gagnée et que tout ce que cela apporte, c’est moins de Liberté. Essayons donc l’inverse. Liberté de se défoncer, Liberté de se dire les choses et Liberté d’apprendre.
La Liberté de vivre ! Qui se donne une chance de gagner ?
PS: L’image d’illustration vient du blog ecriteauxcithares
Mise à jour du 25 mars 2016
Voici deux titres que j’aimerais ne plus voir :
Trafic de cannabis : démantèlement d’un réseau à Saint-Ouen lorsque l’on sait que la radicalisation a lieu en prison, on y jette tout de même les « principaux protagonistes » pour 15 kg saisis…
Alain Juppé : « Tariq Ramadan n’est pas le bienvenu à Bordeaux » cela va à l’encontre d’un débat avec les détracteurs éventuels. C’est un éminent intellectuel à qui l’on voudrait couper la parole plutôt que l’écouter avec un esprit critique.
- Ministère de la Justice, consulté le 24 mars 2016 [↩]
- Laurent Mucchielli, « Justice, délinquance et sociologie…» dans La revue pour l’histoire du CNRS (En ligne), 24 | 2009, mis en ligne le 05 octobre 2009, consulté le 24 mars 2016. URL : http://histoire-cnrs.revues.org/9076 [↩]
- Patrick Hilsman, «How Decriminalising Drugs Could Reduce Islamic Terrorism in France and Belgium» sur Vice.com, mis en ligne le 24 mars 2016, consulté le 24 mars 2016. URL: http://www.vice.com/en_uk/read/how-decriminalizing-drugs-could-reduce-islamic-terrorism-in-france-and-belgium [↩]
- publié le 22 mars 2016, consulté le 24 mars 2016 [↩]
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